Portrait: Hailé Sélassié Ier, le dernier empereur d’Éthiopie
Né en 1892, Tafari Makwannen est plus connu sous le nom de Haïlé Sélassié. Son ascendance remonterait jusqu’aux rois Salomon et David, selon la tradition chrétienne orthodoxe éthiopienne. Il est ainsi considéré comme « le dirigeant légal de la Terre » selon la plupart des rastas. Sa mère, étant décédée du choléra deux ans après sa naissance et son père, ayant disparu en 1906, Tafari fut éduqué par l’empereur Ménélik II. Le 2 novembre 1930, il fut couronné « Roi des Rois d’Ethiopie », considéré comme le « Seigneur des Seigneurs, Lion conquérant de la tribu de Juda, Lumière du Monde, élu de Dieu ».
Haïlé Sélassié continua la politique de modernisation progressive lancée par son prédécesseur Ménélik II, ce qui permit à l’Éthiopie d’être admise dans la Société des Nations en 1923 et de décréter la première constitution du pays en 1931. L’empereur supprima également l’esclavage, malgré son ancrage profond dans la société, par le biais des décrets de 1918 et de 1923. Cependant, la Société des Nations demeura impuissante face à la guerre entre l’Italie et l’Éthiopie, dont l’invasion italienne de 1935 obligea l’empereur à s’exiler en Angleterre de 1936 à 1941. La France et la Grande-Bretagne furent les principales alliées de l’empereur, ayant réussi à retrouver une totale souveraineté sur l’Empire dès 1941. Le « Roi des Rois d’Éthiopie » entretenait de bonnes relations avec Franklin Roosevelt et les autres Alliés, ce qui permit à l’Éthiopie d’accéder à l’Organisation des Nations Unies dès sa fondation. Durant la guerre froide, il prit une position de non-aligné et il participa à la conférence de Bandung, afin de veiller à l’indépendance et à l’unification du continent africain. Il influença également la fondation de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) en 1963, dont le siège fut établi dans la capitale éthiopienne Addis Abeba.
En décembre 1960, à la suite d’une tentative de coup d’Etat, à laquelle le prince héritier Asfaw Wossen fut mêlé, l’empereur exerça une politique plus conservatrice, s’alliant avec l’Occident contre les gouvernements africains plus radicaux. Face aux mécontentements des étudiants et d’une partie des élites, Hailé Sélassié Ier fut renversé le 12 septembre 1974 par un coup d’État militaire. Il est décédé en prison le 27 août 1975, en raison d’une opération de la prostate, selon l’histoire officielle, notamment véhiculée par les médias. Cependant, il semblerait qu’il ait été assassiné, par strangulation ou par étouffement. Sa dépouille fut enterrée sous le bureau du dictateur Mengistu, défait en 1991. Une fois les restes de l’empereur retrouvés en 1992, il reçut des funérailles populaires en 2000, dans la cathédrale de la Trinité d’Addis Abeba.
Plusieurs adeptes du mouvement spirituel rastafari, influencés par une volonté de retour vers l’Afrique, considèrent que l’empereur représente un messie noir, menant la diaspora et les peuples africains vers la liberté. Certains rastas considèrent que le « Roi des Rois d’Éthiopie » est encore bel et bien vivant et que la médiatisation de sa mort fait partie d’un complot visant à discréditer leurs croyances spirituelles. Le discours de Sélassié aux Nations Unies en 1963 a d’ailleurs inspiré une chanson culte de Bob Marley : War. Cela concernait à la fois la paix, l’espoir, la douleur et la non-violence. Néanmoins, lors d’une visite d’État en Jamaïque en 1966, Hailé Sélassié fut considérablement intrigué par les salutations d’une foule dès son arrivée à l’aéroport. Chrétien pratiquant, l’empereur aurait confié à un clerc éthiopien, l’Abune Yesehaq, son incompréhension face aux croyances des rastas, selon lui dépourvus de connaissances quant à la culture religieuse éthiopienne. L’église orthodoxe de ce pays s’installa donc en Jamaïque, afin de convertir les rastas au christianisme tewahedo.
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