Point culture : Le Soudan

Le Soudan

Comme vous l’aurez deviné, c’est le Soudan que nous mettons à l’honneur pour le mois d’avril

L’Afrique, continent de la diversité, berceau de traditions sacralisées, trésor d’une culture ancestrale aussi riche que profonde, est le continent des mystères par excellence. À la lumière d’un système de poupées russes, il nous invite à découvrir un de ses nombreux territoires, incite notre orgueil à se satisfaire d’une nouvelle découverte “unique”, d’une connaissance profonde d’une population, avant de nous rappeler que sa profondeur territoriale et culturelle, la diversité de peuples et ethnies qu’il englobe est indéchiffrable, insatiable et infinie, nous invitant alors à une posture d’humilité nécessaire. Le continent africain, riche de sa variété, nous plonge alors, dans une quête désintéressée, à laisser tomber le voile des préjugés, des jugements moraux et des déterminismes sociaux.  Il nous rappelle que chaque pays, chaque civilisation est le fruit d’une construction culturelle et sociale unique, lui conférant une vision du monde, de l’idéal, du sacré, radicalement différente de nos ancrages. 

C’est dans cette posture intellectuelle d’humilité et de découverte que l’intérêt porté aux rites du mariage soudanais nous offre de nombreux secrets fascinants. 

Des préparatifs à la mécanique ficelée 

Le mariage, au-delà de sa dimension symbolique et du patrimoine culturel qu’il englobe, est souvent pour ses principaux acteurs “la cérémonie d’une vie”, parfois l’aboutissement d’un rêve, à la fois pour la famille et pour les mariés. 

L’évolution des mœurs au Soudan a d’ailleurs renforcé ce sentiment, les “mariages arrangés” laissant progressivement place à une liberté des futurs époux, dont l’union est souvent le fruit d’une rencontre dans différents espaces de socialisation comme l’université, le travail ou les cérémonies. L’importance accordée au mariage et à sa consécration se manifeste alors par des préparatifs qui s’inscrivent dans une temporalité particulièrement longue et suggèrent un investissement conséquent sur le plan physique et matériel de la part des familles.

Dans une société à majorité musulmane (90%), les familles ont une place prépondérante dans le processus du mariage et dans son aboutissement. Elles sont particulièrement écoutées et respectées. C’est alors à l’homme qui souhaite se marier de demander la main de sa bien-aimée auprès de sa famille. Pour ce faire, il est alors accompagné d’une délégation menée par le chef de famille qui formalise la demande auprès de la famille de la future épouse. Cette dernière aura alors un délai de deux semaines durant lequel elle mène ses enquêtes sur le futur époux, avant de donner une réponse définitive. À l’issue de ces deux semaines, lorsque la réponse est positive, les deux mères se rencontrent pour discuter des modalités et des préparatifs du mariage.

Une mécanique intense se déclenche alors à partir de ce moment-là. Quelques jours plus tard, le mari, accompagné de sa famille, consacrent la bonne nouvelle (gulet kheir), en apportant  à la famille de l’épouse la dot (sheyla) dont la composition est diversifiée. Elle peut comporter de l’or, des parfums, des crèmes, mais aussi et surtout de l’argent afin de permettre à la famille de l’épouse de financer le mariage.  

Ensuite, dans les deux mois précédant la cérémonie du mariage, la future épouse n’est plus autorisée à quitter sa maison. Durant cette période, elle se consacre à un exercice de purification,  à travers la tradition du dukhān : Chaque jour, et  pour une durée de trois heures, nue, elle s’assoit sur un tapis en fibres, recouverte d’une grande couverture (shamela), elle filtre son corps et le purifie en respirant le parfum de différentes herbes naturelles (malhib, musk, ambre) réputées pour leurs vertus curatives et purificatrices.

La future épouse participe également à un exercice d’adoucissement de la peau à travers une forme de gommage corporel (dilka) à base de pâte faite à partir de farine de blé entier, de thé à base de clous de girofle, de zestes d’orange et de mahleb.

Durant ces mois de préparation, la future épouse prend également des cours de danse, un “savoir-faire” d’une importance particulière dans la culture soudanaise 

La cérémonie de mariage : l’expression d’un aboutissement par la danse

Après de longs mois de préparation, le jour tant attendu s’annonce enfin imminent. Le matin précédant la cérémonie du mariage, la future épouse, accompagnée de ses amies, se fait appliquer le henné dans différentes parties de son corps (jambe, pieds, mains, avant-bras), décoré alors de merveilleux motifs floraux. La même activité se produit séparément du côté de l’époux, accompagné de ses frères et ses amis.

D’autre part, au cœur d’une tradition soudanaise sacralisée, la future épouse, au milieu d’une foule féminine attentive, se prête à un exercice de danse aux mouvements et gestes minutieusement préparés en amont. Dans une logique d’humilité, inhérente à la tradition islamique soudanaise, la danse se fait sans la présence de tout public masculin, la femme n’étant pas couverte, comme il est coutume au Soudan. 

Enfin, après le coucher du soleil, la soirée de célébration du mariage peut commencer. Dans un décor soigneusement choisi, souvent à l’intérieur de grandes salles ou tentes pouvant accueillir plusieurs centaines de personnes, les familles, ainsi que les amis partagent un moment de convivialité et de joie souvent inoubliable. L’épouse est traditionnellement vêtue d’un tob rouge (tenue nationale soudanaise), et l’époux d’une djellabiya de même couleur. D’ailleurs, la tradition veut que durant cette cérémonie, les époux boivent du lait puis se donnent pour défi de cracher ce dernier en premier sur l’autre époux, dans une scène comique, amusant l’ensemble des invités.

Au Soudan, plus qu’une institution, le mariage est un patrimoine unique, constitutif de la place accordée par les familles à la consécration d’années d’éducation, de proximité et d’attachement à leurs enfants, qui laisse place désormais à une nouvelle vie de responsabilité et de construction familiale. D’ailleurs, la célébration du mariage ne s’achève pas pour autant dès la fin de la soirée. Loin de là, elle se prolonge plusieurs jours plus tard, à travers différentes réunions familiales auprès de repas conviviaux, composés de gâteaux traditionnels préparés par les familles des époux.


Bibliographie : 

Sudanese Wedding Traditions, Amena Teferi (Youtube), consulté le 2 avril 2023

Rites du mariage, Open journal editions, consulté le 2 avril 2023

https://books.openedition.org/africae/2977?lang=fr

Les traditions du mariage soudanais, Groppi Tours, consulté le 2 avril 2023

Fatima & Mohamed Sudanese Wedding in New Zealand, Youtube, consulté le 2 avril 2023



Ghali Benkiran

 L1 Droit, membre actif du pôle rédaction d’ESMA

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