Le journal d’ESMA N°3 – « Social Impact Bonds » : La finance au service de l’éducation en Afrique

La finance au service de l’éducation en Afrique

27mars11
Dans le programme « Vision 2020 » au Rwanda, l’Etat s’appuie sur des investisseurs privées pour équiper ses écoles en matériel informatique

En comparaison à d’autres continents qui voient la croissance de leur population se ralentir, la population en Afrique ne cesse d’augmenter. En quelques chiffres, selon les sources de l’OCDE (Rapport “Africa’s Development Dynamics” 2018), entre 2000 et 2015 la population africaine a augmenté de 400 millions de personnes, soit une croissance de 50% environ. D’après les projections de l’ONU, la population du continent devrait encore croître de 42% sur les quinze prochaines années pour atteindre les 2,5 milliards en 2050. En se penchant de plus près sur l’étude de l’ONU, il est intéressant de noter qu’à l’horizon 2050, il est attendu que la population africaine en âge de travailler (entre 15 et 64 ans) connaisse une augmentation de 902 millions de personnes soit 69% de l’augmentation mondiale pour cette catégorie d’âge. (1)

Face à une telle croissance, les avis divergent; là où certains y voient une opportunité incroyable d’accélérer la croissance du continent, d’autres y voient un poids supplémentaire qui ralentirait le développement des différents pays. Au delà de ce débat, il serait plus pertinent d’étudier les différents facteurs qui permettraient de remporter les défis de cette jeunesse croissante. Afin que tous ces jeunes intègrent la population active et enrichissent l’offre de travail sur le marché, l’éducation est une priorité sur laquelle il est indispensable de se focaliser.

Origines et fonctionnement des Social Impact Bonds (SIB)

Schémas_de_fonctionnement_des_SIB
Schéma conçu par Feth Eddine Aggad

Face à une population qui risque de voir son nombre plus que tripler en l’espace de 50 ans, les gouvernements Africains se voient obligés de repenser les systèmes éducatifs. Considérant un tel rythme de croissance sur une période aussi restreinte, les finances publiques peuvent difficilement accompagner cette jeune population sur le terrain éducatif. En effet, du point de vue stratégique comme matériel, il est délicat de construire autant d’écoles et de former autant de professeurs. De multiples projets visant à pallier durablement à ce manquement voient le jour, ce qui a mené le continent à devenir le théâtre de nombreuses avancées technologiques concernant l’éducation, et ce à partir d’outils tels que l’intelligence artificielle, les nouvelles technologies ou de nouveaux instruments financiers. Il est possible de citer comme exemple la famille des “Social Impact Bonds” (SIB) existant depuis 2010 (Programme “Social Finance” au Royaume Uni). En bref, ce mode de financement intervient lorsque les dépenses publiques n’arrivent pas à assurer correctement les services publics ou sociaux, le financement se fait alors par un organisme qui s’occupe de lever des investissements privés.

À la ratification du contrat, l’acteur public, qui joue le rôle de souscripteur, fixe un certain nombre d’objectifs à atteindre et sur lesquels se basera la rémunération du titre. Il est possible d’imaginer le cas d’un SIB qui financerait des formations universitaires, le remboursement se ferait par exemple en fonction du nombre de diplômés mais également de l’insertion professionnelle post graduation. Suite à une période déterminée, un évaluateur indépendant se charge d’étudier les performances du fournisseur de service vis à vis des objectifs initiaux.

Tous les SIB ont deux points en commun: la responsabilité et le financement initial. D’une part, la rémunération étant fonction des résultats obtenus, la responsabilité des investisseurs constitue un fort levier incitatif car leur implication à choisir les projets qui ont la plus grande chance de succès augmente leur probabilité de remboursement. D’autre part, les fournisseurs de services bénéficient d’un capital initial ce qui, en son absence, est l’un des principaux obstacles auxquels font face les projets sociaux. Depuis 2015, un nouveau venu a fait son entrée dans la famille des “Social Impact Bonds” , il s’agit des “Education Bonds” (Première initiative: “Educate girls” impact bond en Inde).

Ainsi, l’outil que représente les SIB appliqué au milieu éducatif dans un contexte émergent pourrait contribuer au développement de l’Afrique. L’Afrique du Sud fait figure de pionnier à l’échelle continentale en lançant une telle initiative à travers “Early Childhood Learning (ECD) Impact Bond”. Ce dernier connu sous le nom de “Impact Bond Innovation Fund” constitue le deuxième SIB contracté en Afrique du Sud et le troisième à l’échelle mondiale impliquant un pays en développement.

L’Afrique du Sud: Pionnier dans le continent

South_Africa_Districts_showing_Cape_Town

ECD Impact Bond vise à améliorer le niveau d’éducation des enfants et ce, depuis leur plus jeune âge. Le principal problème qui a motivé l’élaboration de ce SIB est l’importante part des enfants n’ayant pas accès à une préparation préscolaire (maternelle) dans le pays. À titre d’exemple en 2015 dans la région ouest du Cap, 130 000 enfants entre l’âge de 3 et 5 ans (40% de cette catégorie d’âge) n’assistent à aucun programme d’éducation préscolaire. Ceci crée de fortes disparités dès le plus jeune âge.

En effet, les enfants les plus défavorisés n’ayant pas accès à un programme préscolaire pour des raisons financières, se retrouvent souvent handicapés par un manque de préparation dès leur entrée en école primaire. Dans ce contexte, “Impact Bond Innovation Fund” permet de fournir des services de visites à domicile pendant une période de 3 ans à 2 000 enfants âgés de 3 à 5 ans issus des communes les plus défavorisées de Cape Town. La rémunération du titre dépendra de multiples indicateurs dont l’assiduité ou encore d’autres outils d’évaluation tels que la mesure des résultats de l’apprentissage préscolaire. (2)

Dans le cas du ECD Impact Bond à Cape Town (Afrique du Sud), “Volta Capital”, l’organisme de levée de fonds a regroupé le capital à partir des trois investisseurs privés qui sont “LGT Venture Philanthropy”, “Standard Bank Tutuwa” et “Futuregrowth Asset Management”. Par la suite, les fonds sont versés à “Western Cape Foundation for community work” qui se charge de dispenser les cours à domicile. Sur la même base que le schémas précédent, les différents acteurs interagissant dans le cadre de ce SIB sont représentés ci-dessous.

Early_Childhood_Learning_Impact_Bond_SA
Schéma conçu par Feth Eddine Aggad

(1) Source: http://www.oecd.org/publications/africa-s-development-dynamics-2018-9789264302501-en.htm

(2) Source: https://www.brookings.edu/blog/education-plus-development/2018/09/25/a-landmark-month-for-impact-bonds-in-education/

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Rédacteur : Feth Eddine Aggad, Etudiant en finance, Membre actif ESMA

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