Être mythique présent chez de nombreuses populations en Afrique de l’Ouest, le Kankourang ne laisse pas indifférent et est l’objet d’une grande admiration.
ESMA vous raconte son histoire…
Chez les mandingues du Sénégal et de la Gambie, le Kankourang incarne un personnage très redouté qui fait son apparition au moment de la circoncision des jeunes garçons. Il a pour rôle de garantir leur sécurité en les protégeant durant tout le long de leur initiation.
Au cours de celle-ci, les jeunes circoncis sont séparés du reste de la communauté afin de recevoir une formation morale et religieuse.
Source : Unesco Africa/Flickr
Les origines du mythe du Kankourang
De nombreuses interprétations existent quant aux origines de cet être mythique : d’après certaines sources, le Kankourang serait originaire de l’empire du Mali sous le nom de Koma, issu de la société secrète du komo : des chasseurs organisés autour des sociétés traditionnelles komo, nama, koré et nya.
Dans ses formes actuelles, le Kankourang serait originaire de l’ancien royaume du Kabou, et plus particulièrement dedans la partie bissao-guinéenne. À l’époque, son masque composé d’un manteau rouge couvrait entièrement l’initié. Selon le vieux Papiya Touré (2), le masque en fibres est apparu suite au décès d’un circoncis dans le Bois sacré au début du XXe siècle, à l’époque où la Guinée Bissau était encore sous administration portugaise.
C’est en 1904 que le Kouyan Mansa (3) Baye Mady Koté introduit le Kankourang à Mbour, au Sénégal. Depuis ce rite d’initiation s’est répandu dans de nombreuses autres zones de peuplement mandingues du Sénégal (à Sédhiou, Kolda et Kédougou…) de Gambie (à Soma, Birkama, Kanifing…) et de Guinée Bissau (à Mansaban, Bafata, Farim…).
Kankourang, art et éducation
Il existe différents types de Kankourang selon les régions : le Fara Kankourang, le Jamba Kankourang, le Fatar Kankourang ou encore le Sisal Kankourang. Selon qu’il soit l’un ou l’autre de ces masques, il doit sa couleur rouge aux écorces de chigommier, au pagne tissé et teint ou aux fibres de sisal.
Rite de séparation, de transformation et de désintégration, l’initiation reçue par les jeunes circoncis s’articule sous la forme d’une cérémonie d’enseignement qu’ils reçoivent des anciens et dont ils doivent garder le secret. Basée sur la structure hiérarchique de la société mandingue, elle fait parcourir aux initiés, durant plusieurs semaines (1) de retraite dans le Bois sacré, une série d’épreuves permettant d’évaluer et d’exercer leur capacité à surmonter la peur, la douleur ou encore la solitude. À la fin de son initiation, le niansun (circoncis) intègre alors le monde des adultes.
Dans les sociétés mandingues, le kankourang exerce donc un rôle de régulateur social, gardien des valeurs et des traditions. En 2003, il est classé patrimoine culturel immatériel mondial par l’UNESCO. Il sera ensuite adopté par d’autres communautés issues de la région telles que les Diola, les Manjack ou encore les Balantes.
(1) La durée de l’initiation peut varier entre plusieurs semaines et plusieurs mois (3 mois initialement, 1 mois aujourd’hui pour la plupart)
(2) Papiya Touré : grand dignitaire de la communauté mandingue
(3) Parmi les populations concernées par le kankourang, on a : les Noumo (forgerons), les Farbo (cordonniers), les Jaloo (griots) et les Kouyan Mansa (chefs du Bois sacré)
Bibliographie
« À la découverte du kankourang », Culturalles.unblog.fr, 12/04/2015
DIATO SEYDI Alphousseyni. « Sauver ou interdire le kankourang dans l’espace Sénégambien ? » (article sur Leral.net), 23/09/2017
DIATO SEYDI Alphousseyni. Le kankourang, masque d’initiation des mandingues de la Sénégambie. (mémoire rédigé pour l’Ecole Nationale des Arts du Sénégal, Master d’Arts Plastiques), 2007
GANO Mamadou. « Le kankourang : un mythe qui s’effondre ? » (article, RFI.fr), 12/07/2017
SY Malick. Kankouran (film), 2001. 52 min.
FORTES Laura, jeune diplômée en journalisme, ISCPA Paris (Groupe IGS)
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