Les Sérères sont un peuple habitant le centre-ouest du Sénégal, au sud de la région de Dakar jusqu’à la frontière gambienne. Ils forment, en nombre, la troisième ethnie du Sénégal, après les Wolofs et les Peuls. Environ un sénégalais sur six est d’origine sérère. Quelques groupes Sérères sont également présents en Gambie et en Mauritanie.
Un peu d’histoire…
Les Sérères constituent l’une des plus anciennes populations du Sénégal. Physiquement, ils appartiennent au type nilotique, c’est-à-dire qu’ils ont une taille haute et élancée, le teint noir et les traits fins. Partis des régions de la vallée du Nil, Égypte-Nubie, ils sont passés par le Gabou (région mythique) et se sont arrêtés au niveau de la vallée du fleuve Sénégal, région qui allait devenir le Tekrour, ensuite le Fouta-Toro. Les Sérères vont d’abord partir du Tékrour à l’époque de l’empire du Ghana, où ils ont fui l’islamisation, mais surtout la sécheresse, pour arriver définitivement dans les régions du Sine-Saloum où ils ont créé les deux royaumes sérères, le Sine et le Saloum. C’est la noblesse guelwar née de l’union entre lamanes (propriétaire terrien) Sérères du Sine-Saloum et aristocrates Mandingues Nanco venus du kaabu, qui régna sur ces deux royaumes qui ont tous deux été vassaux de l’empire Djolof, dont ils sont devenus indépendants à la fin du XVIe siècle, avant d’être annexés à la fin du XIXe siècle par la colonisation française. Les Sérères sont en partie, avec d’autres ethnies, les ancêtres des Wolofs. Ndiadiane N’diaye l’ancêtre des wolofs d’après la tradition orale a reçu son nom, N’diaye, des Sérères. Les Lébous sont également descendants des Sérères.
Ethnonyme
Il est admis que le mot Sérère, vient de l’égyptien ancien qui signifie « celui qui trace les contours des temples ». Pour d’autres, l’ethnonyme viendrait plutôt du mot égyptien Sa-Re ou Sa-ra, qui signifie « le fils du démiurge », le Dieu Ra ou Re dans l’Égypte et la Nubie antique.
Société
Les Sérères occupent toutes les régions du Sénégal comme l’attestent les noms de localités comme Diamniadio et Diokoul, dans la presqu’île du Cap vert, ou leur implantation dans la région du fleuve et au Fouta-Toro, en tant que Toucouleurs, surtout dans la catégorie sociale des pêcheurs, les Subalbes, Cuballo au sing. Ce sont des cultivateurs sédentaires qui accessoirement, font de l’élevage. Les Sérères du Cayor, présents dans la province cayorienne du Diander, et ceux du Baol, sont les Safen, les Ndut, les Léhar ou lalah, et les Nones. Ceux du Sine-Saloum sont les Sérères Sine. Les Sérères Niominka qui pratiquent la pêche dans le delta du Saloum. La société sérère était stratifiée en castes, proche du modèle wolof, mais beaucoup moins strict. Dans la société traditionnelle, il y avait au sommet de la hiérarchie les Guelwar, ils étaient Tiédos. Parmi ces fils de roi, le plus âgé des hommes qui est de la descendance matrilinéaire Mansa Waly Dione fondateur du Royaume du Sine, devient Maad (Roi). Les membres de cette descendance matrilinéaire sont appelés Guelwar, thiédo ou pino maad ce qui signifie « fils de rois ». Après les cavaliers, viennent les hommes libres qu’on appelle diambours, puis les badolos, que l’on définit comme ceux qui ne possèdent personne et que personne ne possède. Il y a des castes typiquement sérères comme les law qui sont des bouffons, les “sagnite” qui sont des bouffons grossiers et les naar no maa ou maures du roi, utilisés pour le renseignement. Les griots sont la mémoire de la société et sont aussi les tisserands. Pour les forgerons, même s’il y a parmi eux des Sérères, ils sont en majorité des wolofs, beaucoup d’entre eux étant parfois d’ascendance toucouleur, ce sont les nyenyo. D’ailleurs chez les Sérères, il arrive qu’on utilise le mot forgeron pour désigner un wolof. Les woudés qui travaillent le cuir et les potiers sont de la caste des nyenyo. Les laobés, artisans du bois, eux sont des Peuls. Au bas de l’échelle sont ceux qu’on possède, les captifs, on les appelle fad. Originellement, le lamane était le plus haut dans la hiérarchie, il était maître de la terre et était assisté par les chefs de village.Il n’y avait pas de caste d’artisans, car chaque famille produisait ses propres produits artisanaux, on pouvait considérer que la société sérère était égalitaire.
Culture et tradition
Par rapport aux autres ethnies sénégalaises, la société sérère se distingue par son originalité, à la manière des Diolas. Les hommes sérères, étaient bardés de talismans, et ils portaient le chapeau conique. Pendant la période des labeurs, ils s’habillent avec des habits sobres pouvant aller jusqu’aux haillons, leurs habits de fête restent le tiawali (pagne tissé) qu’ils partagent avec les peuls. Les hommes sérères portaient autrefois les cheveux tressés, des coiffures totémiques, liés aux totems de chaque clan. Durant la période qui précédait la circoncision, les jeunes garçons portaient le ndjumbal, une coiffure de tresses, que les peuls arboraient également. L’expansion de l’islam a fait disparaître ces pratiques, à la première moitié du XXe siècle. Les femmes étaient vêtues d’un pagne et d’un boubou bleu indigo à rayures noires, ainsi que d’un foulard noué sur la tête de façon artistique, le Moussor, avec des coiffures complexes. Elles se paraient de différents bijoux d’or ou d’argent, ainsi que de pièces de monnaie qu’elles attachaient à leurs cheveux, comme le font aussi les femmes peuls. Elles avaient également des anneaux d’or ou d’argent aux chevilles. Elles avaient les lèvres et les gencives tatouées. Ce sont les femmes peuls Laobés qui pratiquaient le tatouage aux jeunes femmes sérères vers l’âge de 15 ans. Le jour de repos chez les sérères est le lundi, certaines activités culturales sont prohibées aussi le jeudi. Les cases sérères sont rondes ou carrées et très spacieuses. Chez les Sérères les cérémonies traditionnelles sont nombreuses:
Le Ndut, célébration de l’initiation qui marque le passage à l’âge adulte, après la circoncision des garçons.
Le mariage qui comprend le ndut des femmes.
Le Mboye, les funérailles.
Le Khoy, est la cérémonie annuelle des grands maîtres spirituels (Saltigué).
Les cérémonies de lutte, où plusieurs lutteurs se réunissent. Les Sérères sont à l’origine de la lutte sénégalaise.
Langue
Le sérère est une langue qui a des liens avec la langue peule et la langue wolof. Il existe plusieurs dialectes sérères tels que le sérère noon, le léhar (ou laala), le safen (ou saafi) et le ndut.
Religion
De religion traditionnelle, les Sérères croient en un dieu créateur, Rog (dieu) ou Rog Sene (Dieu Unique), dont ils bénissent les créations, en faisant des offrandes aux pieds des arbres, aux fleuves, à la mer, etc. Pour les Sérères, les prières sont surtout adressées aux ancêtres appelés Pangol, car étant les intermédiaires entre le monde des vivants et le divin. En effet, pour le sérère resté fidèle à la spiritualité ancestrale, l’âme des ancêtres sanctifiés, reste en interactions avec les vivants, depuis leur demeure divine. Les Pangol sont soit des personnages ayant marqué l’histoire du peuple, un roi/reine, ou chef de village disparu, que toute la communauté célèbre, en rapport avec sa vie exemplaire sur terre et en parfaite adéquation avec les recommandations divines, ou bien un être cher disparu, que l’individu honore par respect. On rend hommage aux ancêtres par des prières mais aussi par des sacrifices, des chants, festivités, etc. Contrairement à la religion chrétienne ou musulmane, pour les religions africaines Dieu est considéré comme trop élevé pour que des prières directes lui soient adressées, d’où le rôle des ancêtres. Pour la spiritualité africaine, si dieu est la source vitale incorruptible à laquelle tous les sanctifiés reviendront pour une paix éternelle, il ne se mêle pas des affaires humaines. C’est à l’homme, ayant le libre arbitre, de chercher la reconnaissance divine, la sanctification, par une attitude en conformité avec les recommandations divines, plutôt que Dieu qui décide des péripéties et vicissitudes, de sa vie. Dans les religions africaines, la croyance en l’immortalité de l’âme et en la réincarnation est très forte. Les esprits (djin) et les anges (maleïka) font partie de ceux qui peuplent le monde invisible. Il y a aussi le totémisme animal, car chaque famille selon son patronyme, sera liée à un animal ou végétal totem. Par exemple pour les” Diouf” qui ont pour totem l’antilope, toute brutalité envers cet animal sera interdite, ce respect leur assure une sorte de protection sacrée. La spiritualité sérère est très marquée par l’ésotérisme, et pour devenir chef spirituel (Saltigué), l’initiation est une obligation. Les hommes comme les femmes peuvent être initiés. Le Khoy ou « miiss », événement religieux réunissant les grands initiés Saltigué, consiste en une cérémonie annuaire dont la durée est généralement de plusieurs jours, où les initiés, qui sont devins et guérisseurs, livrent leurs prédications à la société, en ce qui concerne les phénomènes météorologiques (à venir), politiques, économiques, etc. Aujourd’hui beaucoup de sérères sont chrétiens ou musulmans, mais beaucoup d’entre eux continuent en parallèle la pratique de la religion ancestrale, ou intègrent à leur christianisme ou islam, des croyances traditionnelles, car bon nombre de rites ancestraux et croyances ont été interdits par l’islam et le christianisme. Au Sénégal, Cette forme de syncrétisme, est aussi observable chez les Diolas. Malgré l’islam et le christianisme, on trouve chez les Sérères, comme chez beaucoup de peuples d’Afrique, une tradition africaine très ancrée dans la vie de tous les jours. Le mode d’ensevelissement sous tumulus est un mode traditionnel de sépulture chez les Sérères. Le ndut est un rite de passage sérère.
Bibliographie
Madior diouf, Daga textes sur la culture sérère.
Mamadou Habib thiam, Omar ndoye, Rites et traditions lébou et serere du Sénégal.
Alphonse Raphaël Ndiaye, La lutte chez les sérères.
Adolphe Sagne, Étudiant en M1 Droit des Affaires à Panthéon-Sorbonne et membre actif chez ESMA.
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