La République de Maurice
Comme vous l’aurez deviné, c’est la République de Maurice que nous mettons à l’honneur pour le mois de janvier.
Le Séga ou le séga tipik comme il est appelé à l’île Maurice est un genre musical populaire que l’on retrouve dans les îles Mascareignes. Sous cette appellation, on retrouve de nombreux archipels tels que l’île Maurice, l’île de La Réunion et Rodrigues, mais aussi des Seychelles, Agaléga, Saint-Brandon, les îles Chagos et d’autres qui se situent dans l’océan Indien.
Chanteurs et danseurs de séga à Maurice
Le Séga, inventé par les créoles d’origine africaine, est devenu un symbole de joie de vivre à l’île Maurice. C’est la forme artistique la plus répandue sur l’île, il comprend à la fois la musique et la danse. Le séga tipik mauricien traditionnel est un art du spectacle dynamique et très emblématique de la communauté créole. Souvent, il est pratiqué lors d’événements familiaux informels ainsi que dans des lieux publics. Les chansons qui commencent de façon mineure voient leur rythme progresser. En même temps, les danseurs bougent leurs hanches et leurs mains à la même cadence donnée par les percussions, en faisant des petits pas pour évoluer les uns autour des autres. En plus, chaque soliste improvise des paroles en langue créole, parfois mélangée à d’autres langues, tandis qu’un tambour, une boîte-hochet et un triangle donnent le tempo. Les chansons du séga parlent souvent d’amour ou des difficultés du quotidien, et leurs paroles sont souvent représentées dans la chorégraphie. Traditionnellement, les femmes portent de longues jupes et des jupons, tandis que les hommes portent des pantalons retroussés, des chemises colorées et des chapeaux de paille, rappelant la tenue de leurs ancêtres. Par sa représentation multiculturaliste de la société mauricienne, le séga fait tomber les barrières culturelles et de classe. À la fois, il crée des opportunités de rencontres interculturelles, et unifie différents groupes autour d’un patrimoine mauricien partagé. Depuis 2014, l’UNESCO a inscrit le séga est sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Histoire du Séga :
L’histoire du séga remonte au temps de l’esclavagisme. Les esclaves originaires de différents horizons se réunissaient loin de leur pays d’origine. Certes, la barrière de la langue se dressait, les us et coutumes divergeaient et la musique n’était pas la même mais cela ne les a pas empêché de se réunir autour de la danse et du chant. Les divergences se sont estompées et ont laissé place au créole. Ce dialecte s’est développé grâce à une simplification de la langue d’origine, ainsi qu’un mélange de différentes langues déjà existantes. Ce nouveau langage s’est fondu dans la musique et une nouvelle forme de séga est apparue. De plus, la musique festive des danses de Paris au XIXe siècle et qui ont été découvertes avec l’arrivée des colons a nourri le séga. Ce dernier, grâce aux diverses horizons dont il est originel, se qualifie comme une fusion regroupant plusieurs peuples, esclaves ou migrants venus vers les îles Mascareignes et l’Océan Indien. Le séga est cri de l’âme. Cette âme veut transcender les misères et les chagrins de la vie, mais en même temps, elle exprime la joie et le bonheur que souhaite désirer l’Homme. Le séga est une histoire. Elle raconte les joies et les tristesses de ceux qui la chantent. C’est un patrimoine nostalgique des anciens esclaves. Les battements offerts par les percussions fournissent le divertissement aux Mauriciens. Aujourd’hui, le Séga fait partie de la vie de chaque Mauricien.
Originellement, le terme “séga” viendrait de la côte Est de l’Afrique. Au Mozambique, “tchéga” se rapporte à une danse très proche du fandango espagnol. Le mot swahili “séga” désigne l’acte de retrousser ses habits, geste typique des danseuses de séga. Le joueur ou le chanteur de séga est appelé “ségatier”.
Les différents instruments du séga :
Le séga possède différents instruments dont la Maravane. Elle est constituée de cannes à sucre alignées et de forme rectangulaire. C’est une sorte de boîte contenant des cailloux ou des billes métalliques. Le musicien agite l’instrument au rythme désiré pour accompagner le chanteur et les autres instruments. Il y a aussi la Ravane. C’est la pièce maîtresse du séga. C’est un tambour taillé dans du bois de goyave chinois, il est recouvert d’une peau de chèvre tendue. On retrouve aussi le Bobre. Il est constitué d’un morceau de bois tendu par deux cordes et relié à une calebasse. Cet instrument n’est plus utilisé de nos jours dans le séga. Enfin, le Triangle est omniprésent dans ce genre musical.
Le Bobre
Le Triangle
Ti Frère, chanteur emblématique du Séga mauricien :
(Ti Frère, chanteur de séga mauricien)
« Le séga de Ti Frère n’est jamais mièvre, il n’a que faire des ritournelles de vacances. Il est âpre et vrai, il est sensuel et païen, il sait parler de l’amour d’Anita et d’Angeline, et rire des politiciens qui mangent pour le peuple », écrit Le Clézio, écrivain franco-mauricien.
Jean Alphonse Ravaton de son vrai nom, alias Ti Frère, est né en avril 1900 à Quartier Militaire dans le centre de Maurice. Son père était Un ségatier d’origine Afro-malgache qui lui transmit son talent. Son père exerçait le métier de cocher et animait les bals avec un orchestre de danse pendant les week-end. Ti Frère a composé de nombreuses chansons, qui sont des grands classiques de la musique Mauricienne. Ces mélodies parlent d’amour, de femmes, de la vie qui s’écoule paisiblement à l’ombre des Filaos, de la vie, de la mort et du bonheur. Ti Frère a été bercé par les musiques européennes et le séga qu’il chantait dans les bals campagnards. Ti Frère est sacré « Roi du séga » en 1964 et il garde son titre jusqu’à sa mort.
Bibliographie :
Gauthier, Églantine. « Du séga créole à la danse nationale. Recompositions locales et circulations transnationales mauriciennes », Revue européenne des migrations internationales, vol. 35, no. 3-4, 2019.
https://ich.unesco.org/fr/RL/le-sga-mauricien-traditionnel-01003
Le Sega mauricien toujours aussi populaire à l’île Maurice
https://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9ga
Sources iconographiques :
Photo 1 : unesco.org
Photo 2 : https://www.locationsmaurice.com/sega-danse-typique-ile-maurice-traditionnelle/
Photos des instruments : unesco.org
Bobre : Musée de Villèle, Histoire de l’habitation et de l’esclavage
Photographie de Ti Frère : https://wesound.academy/artist/3394/ti-frere
Maïssa Gourar, Master 2 TPTI à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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